1874 |

1874-14

Marie Mertzdorff

Samedi 21 février 1874

Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)

Samedi 21 février 1874

Samedi 21 février 1874

Paris 21 Février 74.1

Mon bon petit père,

Décidément je n’ai pas de tête j’ai pensé toute la matinée qu’il fallait que je t’écrive puis tout à coup cette idée s’est en allée, je viens de flâner pendant une demi-heure et me voilà au dernier moment pour te griffonner ces quelques lignes.

Hier Emilie2 a été à 1h à l’église pour son examen. Moi je n’ai pas pu y aller car c’était l’heure de Mlle Bosvy. Il paraît que cela s’est très bien passé elle c’est M. le curé3 qui l’a interrogée ; elle a eu <5> questions et elle croit avoir des 5 pour toutes elle était bien un peu troublée.

Je crois que je ne t’ai pas dit que Cécile4 avait été subitement appelée à Lyon par la maladie très grave de sa mère les personnes qui lui ont apporté cette nouvelle ont dit qu’il n’y avait plus d’espoir.

Nous couchons en bas à côté de tante5 ce qui nous amuse énormément.

Mon cher père, quoique comme je pense que le moment où nous allons t’avoir approche beaucoup je m’en vais te donner quelques petites commissions que tu seras bien gentil de faire.

1° Emilie trouve que ses jeux du Mercredi soir avec Jeanne et Marthe6 sont toujours les mêmes aussi voudrait-elle bien avoir le mariage des fleurs (la boîte est en très mauvais état tu pourrais si tu veux n’apporter que les cartes) ainsi que le jeu de loto d’histoire de France.

2° Nous désirerions lire le Jeudi avec nos amies les Anglais au pôle nord7 qui se trouvent dans le magasin d’éducation il est inutile de l’emprunter puisque nous l’avons là-bas.

3° Oncle Alfred8 m’a chargée de te faire bien des amitiés de sa part et te demander si tu l’as oublié car il aimerait bien avoir les nouveaux Dinglers je ne sais pas bien l’orthographe de ce nom mais je crois que tu sais.

Voilà mon père chéri, une bien grande liste qui va probablement t’ennuyer je te demande bien pardon.

Je crois que nous ne t’avons pas encore raconté l’emploi de nos jours gras. Dimanche (comme Emilie te l’a dit) grande partie de cache-cache. Lundi nous n’avons eu pour toute récréation que Mlle Bosvy 2 ½ à 5 ½. Mardi nous travaillions tranquillement lorsque Jeanne Brongniart arrive et nous annonce une de ses amies de Vichy en effet une grande demoiselle la suit on se salue froidement et pendant quelques temps Emilie s’efforce à être aimable, puis nous partons d’éclats de rire, c’était Charles9 qui avait mis des robes et chapeaux à sa mère10. Nous nous amusions bien lorsque Noël Dumas arrive. Nouvelle mystification lui qui connaît bien Charles ne le retrouve plus sous son voile et prend des airs embarrassés des plus comiques, ce n’est qu’au bout d’un temps assez long qu’il a fini par trouver la vérité.

Ils sont encore venus le soir et nous avons joué à toutes sortes de jeux.

Mais adieu mon père mignon, je te demande mille pardons mais je ne t’ai écrit rien 10 minutes nous partons chez Mlle Poggi prendre notre leçon de piano

encore mille amitiés

ta fille qui t’aime

M.M.

et les jeux se trouvent dans le bas de l’armoire de joujoux

Tante oncle11 et Emilie t’embrassent bien.

Notes

1 Lettre sur papier deuil.
2 Emilie Mertzdorff.
3 Probablement Ernest Marie de Geslin, curé Saint-Médard.
4 Cécile, bonne des demoiselles Mertzdorff.
5 Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
6 Probablement Jeanne et Marthe Pavet de Courteille.
7 Jules Verne (1828-1905), Les anglais au Pôle Nord : aventures du Capitaine Hatteras, J. Hetzel (4e édition : 1867).
8 Alfred Desnoyers.
9 Charles Brongniart, frère de Jeanne.
10 Catherine Simonis, épouse d’Edouard Brongniart.
11 Aglaé Desnoyers et son époux Alphonse Milne-Edwards.

Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Marie Mertzdorff, «Samedi 21 février 1874», correspondancefamiliale [En ligne], Correspondance familiale, 1870-1879, 1874,mis à jour le : 29/04/2013

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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