1915 |

1915-61

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart)

Lundi 8 novembre 1915

Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Léon Damas Froissart (Campagne les Hesdin) à son fils Louis Froissart (Paris)

Lundi 8 novembre 1915

Lundi 8 novembre 1915

BRUNEHAUTPRE   
Campagne-Les-Hesdin   Brimeux       
Pas-de-Calais1   

8 Novembre

Mon pauvre Louis,

Tu n'es donc pas bien satisfait de tes élucubrations2. Cette maudite histoire de la philosophie aura été encore la pierre d'achoppement ! Mais enfin l'on peut espérer encore que les autres compositions auront eu assez de mérites pour compenser le démérite de celle-ci. En tous cas ton papier orange et ton enveloppe rose n'avaient pas trop la tournure d'un enterrement et je veux espérer que leur ton de gaîté était de bon augure.

Le voyage de Françoise3 s'est bien fait malgré sa longueur : environ 12 heures de porte en porte ! Elle est contente de se trouver ici avec l'auréole des 7 petits enfants4 et cela lui fera du bien, je pense.

Et toi aussi, tu vas bientôt venir te retremper dans l'atmosphère familiale de Brunehautpré ? Tu auras bien besoin d'un peu de repos mon pauvre enfant. Je serai heureuse de te revoir parmi nous. Pour combien de temps ?... peu de semaines peut-être seulement.

Lucie5 vient d'être un peu souffrante et est encore astreinte à quelques semaines de soin ce qui nous la retiendra à Brunehautpré jusqu'au 8 Décembre peut-être, car il vaut mieux qu'elle ne prenne pas tout de suite la fatigue du voyage. Je ne sais pas si nous prendrons nos quartiers d'hiver avant elle, mais ce que je sais bien, c'est que je n'attendrai pas jusque-là pour voir Pierre6. Nous avons été bien heureux de la visite de Michel7, quoiqu'elle ait été très courte. Il est vraiment bien avec sa croix de guerre. Mais ne serait-ce pas justice d'en voir aussi une à Guy8 ? Sais-tu que Jean9 a la médaille militaire et la croix de guerre avec palmes ? il les a bien méritées. Laure10 attend impatiemment la permission de Jules qui la lui fait espérer depuis longtemps.

Lina11 est-elle arrivée ? que dit-elle de son blessé12 ?

Nous avons lu la « Vie d'un Heureux13 » et je suis loin d'être aussi sévère que toi, car autant que je me rappelle, tu n'as pas trouvé cela « énorme ». Cela me semble déjà plein de talent et susceptible de donner de grandes espérances si, hélas !... quel dommage !

Suzette14 a un peu mal à la gorge ; ce ne sera rien. Elle est devenue mon élève ce qui va me faire monter quelques échelons vers le Paradis ! tant mieux ! Guy et Made15 sont aujourd’hui à Béalencourt16 avec ton papa17.

Quand sauras-tu le résultat de ton écrit ?

Je t'embrasse très tendrement, cher petit.

E. Froissart

Notes

1  En-tête imprimé.

2  épreuves de la licence de philosophie.

3  Françoise, employée par les Froissart.

4  Probablement : Anne Marie, Suzanne, Georges et Geneviève Degroote ; Patrice et Bernard Colmet Daâge ; Jacques Damas Froissart.

5  Lucie Froissart, épouse d’Henri Degroote.

6  Pierre Froissart, frère de Louis.

7  Michel Froissart, frère de Louis et Pierre.

8  Guy Colmet Daâge, blessé au bras.

9  Jean Froissart.

10  Laure Froissart, épouse de Jules Legentil et sœur de Jean.

11  Lina, employée par les Degroote.

12  Probablement son époux, Jules.

13  Henry Du Roure (1883-1914), Vie d'un heureux, publié par Jean Des Cognets et Léonard Constant, 1915.

14  Suzanne Degroote.

15  Guy Colmet Daâge et son épouse Madeleine Froissart.

16  Béalencourt dans le Pas-de-Calais.

17  Léon Damas Froissart.


Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart), «Lundi 8 novembre 1915», correspondancefamiliale [En ligne], 1910-1919, Correspondance familiale, 1915,mis à jour le : 04/11/2014

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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