1917 |

1917-027

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart)

Jeudi 19 avril 1917

Lettre d’Emilie Mertzdorff, épouse de Léon Damas Froissart (Paris) à son fils Louis Froissart (mobilisé)

Jeudi 19 avril 1917

Jeudi 19 avril 1917

19 Avril1

Mon cher enfant,

Ta longue lettre du 12 est venue nous faire partager ta vie, un peu tes fatigues, beaucoup ton entrain et ton espoir. Nous avons d’ailleurs à vous féliciter tous du bon ouvrage que vous faites. Sans doute vous aviez rêvé d’avancer davantage et d’aller plus vite en besogne et vous vous heurtez à de grosses difficultés qui ne rendent que plus méritoires vos succès. Bon courage pour continuer !

J’ai été, au reçu de ta lettre, prendre des nouvelles de ton commandant2. Mme Marc3 était partie le matin même pour Amiens où il est hospitalisé et sa belle-mère4 était sortie, mais la bonne pensait que l’on n’avait pas d’inquiétude.

Quel temps il fait ! il y a bien lieu d’attraper une bronchite par cette humidité si froide, ces rafales de vent et de neige. Et vous devez rester mouillés bien longtemps sans doute. Je plains surtout les pauvres fantassins. Quelle rude existence !

Lucie5, à cause de cet affreux temps, n’a pu sortir encore. Henri est à Hazebrouck ; je pense qu’il rentrera cette nuit ou demain.

Je regrette que les colis soient si lents à t’arriver. Je n’ai pas assez compté avec ces longs délais, et je crains que certaines choses n’arrivent pas en bon état, le veau notamment. J’ai eu aussi une idée malencontreuse, me dit Michel6 en t’envoyant des camemberts et surtout sans doute du pain complet et de la langue en sandwichs ! Le 12 je t’ai envoyé un morceau de bœuf mode aux carottes en gelée fait par Bertha7.
le 13, ½ livre de beurre frais
le 16 une boîte de 40 tablettes de chocolat et les sandwichs
le 17 un fromage de Hollande en boîte de fer blanc et une noix de jambon et du lait sucré
aujourd’hui 19 un saucisson et un autre colis contenant 6 œufs frais et du beurre. Les œufs viennent d’arriver de Brunehautpré.

Nous avons eu Dimanche soir la visite de ton oncle Paul8 et de Cécile9 qui se rendaient à Caen pour affaires d’argent (c’est le Tours de ton oncle). La pauvre Laure10 est bien inquiète de Jules. Elle pourrait l’être aussi pour Cagnicourt11, mais les préoccupations matérielles passent au second plan.

Je t’embrasse tendrement, cher petit. Je t’envoie une médaille qui remplace le scapulaire, ne me rappelant pas si tu en as une. Mets-la simplement dans un coin d’une poche ou de ton porte-monnaie. En ce moment, il ne faut rien négliger.

Emy

Jacques12 n’est peut-être pas loin de toi, mais Elise13 est sans nouvelles depuis 4 ou 5 jours.

Notes

1  Lettre sur papier deuil.

2  Le commandant Charles Marc.

3  Marie Marthe Petit, épouse de Charles Marc.

4  Marie Audebert, veuve d’Henri Marc, belle-mère de Marie Marthe Petit (ou bien Françoise Triadou, veuve Petit, belle-mère de Charles Marc).

5  Lucie Froissart, épouse d’Henri Degroote.

6  Michel Froissart, frère de Louis.

7  Bertha, domestique.

8  Paul Froissart.

9  Cécile Dambricourt, épouse de Maximilien Froissart et belle-fille de Paul Froissart.

10  Laure Froissart, épouse de Jules Legentil.

11  Laure Froissart et Jules Legentil sont propriétaires à Cagnicourt (arrondissement d’Arras).

12  Jacques Froissart, frère de Louis.

13  Elise Vandame, épouse de Jacques Froissart.


Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart), «Jeudi 19 avril 1917», correspondancefamiliale [En ligne], 1910-1919, 1917, Correspondance familiale,mis à jour le : 10/04/2015

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
EHESS
54 boulevard Raspail
F-75006 Paris