1917 |
1917-063
Léon Damas FroissartMercredi 8 août 1917
Lettre de Léon Damas Froissart (en cure à La Bourboule) à son fils Louis Froissart (Paris)
La Bourboule le 8 août 17
Mon cher Louis,
J'ai au moins une lettre de toi à ta mère1 en date du 30 juillet, dont le renseignement le plus saillant est que, ne pouvant pas beaucoup te dévouer pour la patrie, autrement que par une préparation scrupuleuse aux combats futurs, tu te dévoues tous les dimanche pour le patronage, plutôt que d'aller t'étendre, pendant de longues heures, sous les frais ombrages d'Écuelles, où je me figurais que tu aurais passé tous les dimanches jusqu'à ce que notre retour à Paris t'y ramène ! C'est très bien à la condition pourtant que tu puisses aller à Écuellesdans la semaine. Car autrement, j'avoue que l'assistance au patronage dépasserait les limites que j'assigne à la place que les œuvres peuvent tenir normalement dans notre vie.
Il est vrai que, en allant à Paris, tu vois non seulement le patronage, mais les Degroote, et tu as pu congratuler ton beau-frère2 de la promotion qui vient de le séparer du « vulgum pecus » des sous-officiers.
Pour en revenir au patronage, et au dévouement dont sont animés tous tes copains et que j'admire, je te mets en garde contre un écueil, c'est d'être tellement empoigné par le sentiment du bien que ses membres font en commun que l'on risque trop de croire que le monde finit au-delà du cercle de ces gens dévoués ; et que, par suite, s'il leur vient l'idée par exemple de se marier, c'est dans les personnes dévouées à Saint Hippolyte ou dont les frères ont des accointances à Saint Hippolyte qu'il faut chercher. Cela, non !
Il faut chercher là et ailleurs, et bien se dire que, quelque parfait que l'on soit à Saint Hippolyte, il peut y avoir plus de chances de trouver la personne qui doit faire notre bonheur en sortant du cercle qui a des attaches à Saint Hippolyte ; et je serai fort disposé à être sévère pour votre œuvre, très méritoire, si elle vous rendait assez particularistes pour vous mettre en tête que c'est parmi les « tenants et aboutissants » de cette institution que vous devez chercher à résoudre le Grave problème du Mariage, comme si, à commencer par la famille, elle n'était pas aussi jalouse de contribuer à assurer votre bonheur, et aussi en situation de vous aider à y parvenir, que peuvent l'être de bons confrères au patronage. X
X Après t'avoir adapté ce lorgnon pour voir plus loin que Saint Hippolyte, j'en viens au but de ma lettre qui est de te dire que je compte rentrer à Paris le mardi 14 août et y trouver ta mère et toi-même. Michel3 m'a quitté lundi pour gagner ce rendez-vous par beaucoup de zigzags. Tu nous diras si la cure nous a réussi. La balance ne dira pas grand chose pour moi.
Après 4 ou 5 jours d'un temps détestable, j'ai ici depuis dimanche midi un beau temps continu. Le départ de Michel m'a laissé un peu isolé mais j'ai fait à l'hôtel quelques connaissances agréables et nous avons, en dehors de l'hôtel, quelques personnes amies.
Je ne doute pas que tu n'aies, par ta mère, toutes les nouvelles de la famille, le succès d'Anne Marie4 au Brevet et celui de Françoise de Fréville au bachot latin langues (avec mention : « bien ») : la voilà à ton niveau en fait de Brevet ou au moins pour le premier ½ diplôme que tu as eu.
Je vois, par ta lettre, que l'on te [bourre] autant [ ] à Fontainebleau : j'espère te trouver, quand même, avec la même bonne santé. Pierre5 pense arriver [permission] le 15 à Paris. Michel compte bien ne pas se faire prolonger cette fois. Jacques6 est toujours content à sa section.
Mille amitiés
D. Froissart.
Notes
1 Emilie Mertzdorff, épouse de Léon Damas Froissart.
3 Michel Froissart, frère de Louis, mobilisé, en convalescence.
4 Probablement Anne Marie de Place.
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D’après l’original
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