1917 |

1917-071

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart)

Samedi 1er septembre 1917 (B)

Gazette multigraphiée n° 2,d’Emilie Mertzdorff, épouse de Léon Damas Froissart (Brunehautpré) à ses enfants ; exemplaire pour Louis Froissart (Fontainebleau) – incomplète

Samedi 1<sup>er</sup> septembre 1917 (B)

Samedi 1<sup>er</sup> septembre 1917 (B)

1er Septembre 19171

Tout d’abord parlons du petit Emmanuel Dupont : l’opération un peu difficile à cause de la position de l’appendice a bien réussi ; pas de fièvre, on ne craint aucune complication. Quand Michel2 était à Bourges, il était un peu souffrant, on croyait à un embarras gastrique mais une crise plus violente a fait découvrir l’appendicite. Marc3 a pu être là pour l’opération.

Mardi nous avons eu une tempête effroyable, pluie, vent ; un orme de la grande pâture près de la petite mare a été renversé, mais sa tête seule plonge grand dans l’eau, quelques pommiers sont victimes de la tempête et une quantité de branches ont été cassées. A Dommartin de nombreux fruits jonchent le sol.

Nous avons eu l’après-midi la visite de M. le Curé de Buire4, toujours plein d’entrain et d’un inlassable dévouement. Il vient d’avoir la satisfaction de se voir charger par les maires de Buire5, de Roussent et de Maintenay de la mission de ravitailler les trois communes en charbon et d’en assurer la répartition. Tout autre eût trouvé cela dur, mais il n’y voit qu’un hommage rendu à son syndicat auquel il a réussi à faire avoir l’an dernier 35 wagons de charbon. Cela lui promet encore bien des courses à Beaurainville la soutane relevée, le gourdin d’une main et le bréviaire de l’autre, de longues stations à la gare pesant les tombereaux et finissant par pelleter lui-même pour aider les retardataires. Il nous a fait des récits pittoresques et bien touchants sur le retour des attelages conduits par des femmes ou des charretiers d’occasion qui mettent leur voiture dans le fossé ou n’arrivent pas à monter la côte, il console la femme qui pleure, stimule l’autre et finit souvent par prendre la place du plus maladroit pour ramener l’attelage. 7 km pour aller 7 pour revenir, et souvent autant pour aller à Bois-jean, son annexe, il arrive à faire parfois les 28 dans sa journée. A 67 ans c’est beau !

Mercredi voyage à Dommartin par la pluie, il faut bien puisque nous n’avons pas autre chose. La petite fille de Louise6 commence à marcher, elle ne elle se nourrit depuis longtemps de soupe au lard et de légumes et pèse à 11 mois 13 kilos. Je fus chez le curé de Tortefontaine7 dont je n’avais pas encore fait la connaissance. Un peu étrange, assurément, mais je m’attendais à plus ; en tous cas, il ne vaut pas M. Coppin8. Naturellement Mme de Bournonville9 était de la course à Dommartin, mais nous n’avions pas emmené les enfants10.

En revanche ils sont venus à Bamières Jeudi. Cécile11 et Marguerite12 y étaient. Jean13 est mitrailleur en Champagne, rien de trop dur pour le moment ; il est au mieux avec son lieutenant Lothé qui est bien le cousin d’Henri. Laure14 toujours à Dunkerque du Vendredi au Lundi. Cécile reprend espoir pour la Suisse, Max paraissant y compter maintenant comme sur une chose à peu près certaine. Nous sommes revenus par Dommartin pour y reprendre Gaston15 que nous y avions laissé la veille afin qu’il ailler de là à Gapennes voir son père16. Il nous a rapporté une photo des enfants de Marguerite17. Louis a extraordinairement grandi ; sa mère se décide à aller habiter Amiens pour le mettre au collège à la rentrée. Nous avons terminé la journée déjà longue pour les enfants par une visite aux Edouard Pénet18 à cause du terrain cédé par Mme Proyart pour rectifier le chemin de Moli la ferme du Hazard, près du bois du Molinel. Michel voit cela. Le pauvre petit Guy était complètement endormi et a mangé sa soupe dans un songe tout en grognant. Jacqui19 déjà plus habitué à ces longues journées d’auto faisait bonne contenance.

Vendredi nous avons eu la messe ici et gardé M. le Doyen20 à dîner. Nous avions des comptes à régler. C’est le petit Louis qui a servi la messe, ce n’est pas encore parfait, il aura besoin des leçons de Michel ou de Louis21. L’après-midi on a conduit Mme de Bournonville voir son propriétaire au Valyvon, puis elle est partie le soir. Les enfants ne se sont pas trop chamaillés mais ne jouaient pas beaucoup ensemble.

Aujourd’hui Samedi, après un magnifique clair de lune, il fait encore un temps pluvieux et maussade ; petite promenade dans les champs et beaucoup de correspondance.

[la fin de la lettre manque]

Notes

1  Gazette accompagnée d’une lettre (document précédent).

2  Michel Froissart, frère de Louis.

3  Marc Ghislain Dupont, père d’Emmanuel.

4  Louis Fourrier, curé de Buire-le-Sec (près de Brimeux).

5  Louis Poupart maire de Buire-le-Sec de 1913 à 1949.

6  Louise, employée par les Froissart.

7  Jules Coquel, nouveau et éphémère curé de Tortefontaine.

8  Jean Marie Coppin, ancien curé de Tortefontaine.

9  Lucille Tefnin, épouse de Maurice de Bournonville.

10  Pierre et Guy de Bournonville.

11  Cécile Dambricourt, épouse de Maximilien (Max) Froissart.

12  Marguerite Dambricourt, épouse de Jean Froissart.

13  Jean Froissart.

14  Laure Froissart, épouse de Jules Legentil.

15  Gaston Piollé, employé par les Froissart.

16  Joseph Hyacinthe César Piollé.

17  Marguerite Froissart, veuve de Gaston Lefebvre, mère de Louis et Jacques Lefebvre.

18  Edouard Pénet et son épouse Augustine Gottran.

19  Jacqui : Jacques Damas Froissart.

20  Jean Baptiste Legay, doyen de Campagne-les-Hesdin.

21  Michel et Louis Froissart.


Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Emilie Mertzdorff (épouse Froissart), «Samedi 1er septembre 1917 (B)», correspondancefamiliale [En ligne], 1917, Correspondance familiale, 1910-1919,mis à jour le : 23/12/2015

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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