1876 |

1876-111

Félicité Duméril (épouse Duméril)

Samedi 23 décembre 1876

Lettre de Félicité, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) à Aglaé Desnoyers (épouse d’Alphonse Milne-Edwards) (Paris)

Samedi 23 décembre 1876

Samedi 23 décembre 1876

Vieux-Thann 23 Xbre 1876.

Bien chère Aglaé,

Hier soir Léon1 nous a apporté les lettres reçues de Paris. Charles2 dit qu’il a trouvé tout le monde bien portant mais que toi et Marie3 vous n’avez pas encore la bonne mine que nous voudrions vous voir. Ai-je besoin de te dire combien Léon est heureux du grand évènement de son mariage et combien nous le sommes tous. Voilà encore que ta bonté et ton bon goût sont mis à contribution pour les objets qu’il désire offrir à sa fiancée4 et à sa future belle-mère5 à l’occasion du jour de l’an, moi de mon côté j’agis bien sans gêne en te priant de faire faire ce qui est nécessaire à la parure de mosaïques que j’offrirai plus tard à Marie Stackler. Les boucles d’oreilles que nous avions mises de côté les croyant trop endommagées, ont été vues par Charles qui pense qu’on pourra les arranger, elles auraient l’avantage de peser moins aux oreilles que celles dont je te parlais. Enfin ma bonne Aglaé, comme toujours je t’adresse mille remerciements.

Nous avons reçu avant-hier une bien douloureuse nouvelle, celle de la mort de notre excellente amie Mademoiselle Ghiselain6, c’est son neveu Anatole7 qui nous l’apprend en nous disant que sa tante s’est éteinte sans être alitée. Le médecin avait regardé son état comme n’étant nullement inquiétant. Quel vide elle va laisser ! elle, dont toute la vie fut consacrée à sa famille et à ses amis. Voilà [encore] une perte irréparable.

Je vais de temps en temps à la fabrique et toujours je trouve Thérèse8 occupée et contente de me voir. Quelle brave, courageuse et honnête fille que cette Thérèse à laquelle je me suis bien attachée.

Hier nous est arrivée une bonne lettre de ma sœur9 renfermant d’excellents détails sur toute la famille de Flers10. Elle a fait dans cette ville la connaissance d’une dame très méritante et d’une sœur qui l’est tout autant, tu vas en juger par le passage qui la concerne dans la lettre de ma soeur.

Sœur Agnès11 est vive, franche, enjouée, très intelligente. Elle nous aime beaucoup, je le vois, Madame Marais12 et moi, et nous prenons auprès d’elle des leçons, nous permettant d’exercer la charité avec l’intelligence et le bon sens pratique que nous fournit sœur Agnès dont les sentiments de pitié sont ennemis du rigorisme : elle fait faire gras aux pauvres les jours maigres, les engage à travailler pour eux le Dimanche, c’est-à-dire à réparer ou à confectionner leurs vêtements, et à plusieurs reprises elle m’a dit : Dieu vous garde d’avoir des scrupules dans les petits détails de la vie ! cela ne mène à rien de bon. Lorsqu’elle sut que mon mari était protestant : ne vous préoccupez pas de son sort, me dit-elle, s’il a été bon chrétien, je suis tranquille sur son compte, et moi j’ajoute, ma bonne Aglaé, que lorsque j’entends parler et raisonner de cette façon, je remercie Dieu qu’il y ait des personnes sachant si bien comprendre et pratiquer la religion.

M. Stackler fils13 vient d’être admis à l’internat des hôpitaux, ayant un congé de huit jours il va venir passer ce temps chez sa mère. M. et Mme Miquey14 nous invitent à dîner chez eux Mercredi prochain afin que nous puissions faire la connaissance de ce jeune homme dont on parle avec beaucoup d’éloges. Adieu chère et bonne Aglaé je t’embrasse comme je t’aime ainsi que nos chéries. Mille choses bien affectueuses à Charles et à ton cher entourage.

Félicité Duméril

Nous comptons aller faire des visites aujourd’hui.

Notes

1  Léon Duméril, son fils.

2  Charles Mertzdorff, venu à Paris voir ses filles.

3  Marie Mertzdorff.

4  Marie Stackler.

5  Marie Stéphanie Hertzog, veuve de Xavier Stackler.

6  Elisa Ghiselain.

7  Anatole Dunoyer.

8  Thérèse Neeff, bonne chez Charles Mertzdorff.

9  Eugénie Duméril, veuve d’Auguste Duméril.

10  La famille d’Adèle Duméril et son époux Félix Soleil.

11  Sœur Agnès : Anne Marie Blanchard, infirmière.

12  Léa Laumonnier, épouse de Léon Marais.

13  Henri Stackler.

14  Étienne Miquey et son épouse Joséphine Fillat.


Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Félicité Duméril (épouse Duméril), «Samedi 23 décembre 1876», correspondancefamiliale [En ligne], Correspondance familiale, 1870-1879, 1876,mis à jour le : 31/08/2017

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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