1863 |

1863-25

Eugénie Desnoyers

Mardi 29 septembre 1863

Lettre dictée d’Eugénie Desnoyers (Ancy-le-Franc) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris), écrite par leur frère Julien

Mardi 29 septembre 1863

Mardi 29 septembre 1863

Ancy le Franc

29 7bre 63

Décidément, ma petite Gla, nous n’arriverons pas le 1er ; comme tu t’en doutais, Alfred1 insiste pour nous garder, et nous prolongerons notre séjour ici jusqu’à Samedi, ou, plus probablement Lundi ; car papa2 est d’avis que nous ne partions pas avant le 5 ; mais c’est la dernière limite et tu peux être sûre d’embrasser mère3 sœur et petit frère4 Lundi soir : quant à papa, il arrivera deux ou trois jours après nous devant aller jusqu’à Auxerre.

Depuis que je t’ai écrit nous avons fait une petite excursion à Montbard. Nous avons parcouru les jardins de Buffon qui sont disposés en terrasses nombreuses et sur lesquelles se remarquent de beaux arbres et des rochers couverts de lierre, de mousse et de petite fougère : c’est la seconde fois que nous en voyons en Bourgogne. Nous sommes montés au sommet d’un vieux donjon qui domine la vallée et d’où l’on jouit d’une vue magnifique… mais je ne veux pas me lancer dans les descriptions ; il faut bien garder quelque chose pour la conversation : d’autant que tu me réponds d’une manière si laconique que je me demande si tous ces détails de voyages t’amusent. Je ne te dirai donc pas que nous avions quitté ancy le franc à neuf heures, assisté à la grand-messe à montbard, et, qu’après avoir rendu nos devoirs à Buffon, nous sommes allés visiter l’ancienne abbaye de Fontenay, qu’enfin à cinq heures, nous étions de retour à la forge.

Maman est un peu fatiguée, et d’ici à notre retour, je vais tâcher qu’elle se repose : pour nous il n’y a plus de projets de voyage : ces messieurs doivent aller seuls à Châtillon.

Nous venons de passer une bonne petite journée à nous deux, Julien ; nous avons dessiné tout un parterre, brillant des plus vives couleurs : il m’a taquinée : nous avons ri : ça fait du bien. Je ne sais si tu reconnais la main habile qui écrit en ce moment sous ma dictée : mon (on n’écrit pas ce que je dicte, j’ai dit mon charmant) secrétaire partage ses faveurs entre tous : tantôt dans l’usine ou au bureau avec M. le Directeur5, tantôt auprès des dames, tantôt cassant des pierres avec papa.

J’ai reçu une très gentille lettre d’Amélie6 : elle me demande de tes nouvelles : je pense que tu lui as écrit : elle dit que sa santé est bonne. Et toi ? J’espère que tu n’es pas trop souffrante en ce moment, et que tu vas m’écrire longuement sans attendre 5 heures ½ pour prendre la plume.

Je n’ai rien d’intéressant à te dire : tu te figures bien la vie que nous menons.

Papa prie Alphonse7 d’aller à la bibliothèque8, comme pour demander un livre, afin de voir si tous les travaux et nettoyages sont assez avancés pour qu’on puisse ouvrir Lundi prochain : et dans le cas contraire demander à Charles9 quel jour il croit que le nettoyage pourra être terminé. R.S.V.P.

Adieu, ma chérie ; nous t’embrassons tous tendrement, et moi, un peu plus que les autres,

Eugénie Desnoyers

Certifié conforme

E D

Notes

1 Alfred Desnoyers, frère aîné d’Eugénie et Aglaé.
2 Jules Desnoyers.
3 Jeanne Target épouse de Jules Desnoyers.
4 Eugénie elle-même et Julien Desnoyers.
5 Alfred Desnoyers.
6 Amélie Desmanèches, épouse d’Emile Delapalme.
7 Alphonse Milne-Edwards, époux d’Aglaé.
8 La bibliothèque du Muséum, dont Jules Desnoyers est bibliothécaire en chef.
9 Charles non identifié, faisant probablement partie du personnel de service.

Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Eugénie Desnoyers, «Mardi 29 septembre 1863», correspondancefamiliale [En ligne], Correspondance familiale, 1860-1869, 1863,mis à jour le : 28/03/2011

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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