1865 |

1865-12

Eugénie Desnoyers (épouse Mertzdorff)

Samedi 8 avril 1865

Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)

Samedi 8 avril 1865

Samedi 8 avril 1865

Vieux-Thann

8 Avril

11 h

Ma chère petite Gla,

C’est pour le mieux ; votre arrivée le 18 fera plaisir à tous1, et je te dirai même que je suis très contente que votre voyage soit remis jusque-là, car j’ai Nanette2 malade, cette pauvre femme a une enflure causée par un abcès à la bouche et comme le cou se prenait aussi je viens de lui poser <16> sangsues et je t’écris de sa chambre. Ce n’est rien de grave en arrêtant l’irritation qui gagnait la gorge, mais elle en a pour quelques jours et cette brave femme est plus tranquille aussi depuis qu’elle sait que mes chers visiteurs ne viendront que dans 10 jours.

La maison est toute prête pour vous recevoir, le jardinier3 vient de remettre des fleurs dans la maison et peigne sa serre ; les rideaux blancs sont mis aux fenêtres, mais nous espérons que tout cela va se conserver propre pour votre venue, et que surtout le temps d’été que nous avons depuis 7 jours va durer pour les bons moments que vous nous donnerez.

Nous passons tout notre temps au jardin, hier promenade au Moulin par le bord de l’eau, 18 degrés à l’ombre et cependant toujours de la neige sur les montagnes.

Je trouve que voilà encore une preuve de ce que nous savons depuis longtemps, c’est que nous autres pauvres créatures nous ne savons pas ce que nous devons souhaiter et nous devons nous en rapporter au bon Dieu pour tout ce qui nous arrive.

Je ne souhaitais que te voir arriver au plus vite et voilà que je me réjouis de ce que ton voyage est remis de quelques jours.

Te voilà lancée, je suis contente que tu vois quelques jeunes femmes. Tu as bien raison de prendre des leçons de dessins, cela t’amusera, tu verras ; quant à moi je néglige les beaux-arts et cependant Charles4 tiendrait à ce que je n’abandonnasse pas ma musique, mais je ne sais comment le temps file, ce matin j’ai été jardiner avec les enfants5 pour mettre leur petit jardin en état. Mardi Mercredi j’ai été à Thann me confesser, Jeudi matin j’ai communié, je voulais être prête pour vous recevoir. J’en suis bien heureuse et toi, ma Gla, tu iras aussi probablement un de ces jours à Notre-Dame, vous avez je crois le Jubilé6, ici on ne le fera qu’au mois de Juillet. Que je voudrais donc que la grande maison se louât bien, cette pauvre mère7 se donne tant de mal, embrasse gros fort pour moi. Dis à papa que tout est bien pour Launay. Charles va lui écrire. Donne une bonne poignée de mains à Alphonse et reçois pour toi tout ce que tu devines

Ta Nie

Mes choux se font une vraie fête de voir tante Agla.

As-tu toujours de bonnes nouvelles de Bordeaux8. Pardon de ce griffonnage mais les sangsues <tombent>

Notes

1 Aglaé Desnoyers est attendue à Vieux-Thann avec son époux Alphonse Milne-Edwards (qui ne pourra venir).
2 Annette (Nanette), domestique chez les Mertzdorff.
3 Il s’agit probablement du jardinier Alphonse.
4 Charles Mertzdorff, époux d’Eugénie Desnoyers.
5 Marie et Emilie Mertzdorff, filles de Charles.
6 Le jubilé universel de 1865 est accordé par l'encyclique Quanta cura adressée par Pie IX à tous les évêques. Le jubilé s’accompagne d’indulgence plénière, solennelle et générale, de quêtes, de dons, d’aumônes exceptionnelles qui, en 1865 comme en 1858, occasionnent un produit important pour l’Eglise. Dans le diocèse de Paris, le jubilé est ouvert le 19 mars et clos le jour de Pâques (16 avril 1865).
7 Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
8 La belle-sœur d’Aglaé, Cécile Milne-Edwards, sur le point d’accoucher, et son époux Ernest Charles Jean Baptiste Dumas, résident à Bordeaux.

Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Eugénie Desnoyers (épouse Mertzdorff), «Samedi 8 avril 1865», correspondancefamiliale [En ligne], Correspondance familiale, 1860-1869, 1865,mis à jour le : 18/11/2011

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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