1919 |

1919-16

Léon Damas Froissart

Mercredi 29 janvier 1919 (D)

Lettre de Léon Damas Froissart (Paris) à son Louis Froissart (mobilisé)

Mercredi 29 janvier 1919 (D)

Mercredi 29 janvier 1919 (D)

Mercredi 29 janvier 1919 (D)

Mercredi 29 janvier 1919 (D)

Louis

Paris 19/1 19 23h50

Mon cher Louis,

Je t’envoie inclue une partie des élucubrations auxquelles je me suis livré depuis 15 jours sur le vu d’un article des Débats.

Membre actif et très payant du Comité National pour les réparations intégrales des dommages, j’ai cru le moment venu (j’en avais déjà entretenu il [y] a 2 mois M. Deschamps1 [cousin] de Guy2) d’aller trouver le Président3 du Comité National Doyen de la Faculté de Droit et de lui dire que pour que la réparation des dommages soit intégrale (comme il l’a demandé tant de fois), il faudrait que ne soient pas négligés les candidats à une licence en droit, ès sciences ou ès lettres qui ont [   ] à la veille de la mobilisation.

J’avais su, au Ministère de l’Instruction publique, qu’il se préparait un règlement général réparateur pour tous les étudiants de toute année et j’avais envoyé un [pensum] pour tâcher de décrocher la licence d’office en faveur des licenciés [manqués] qui s’étaient distingués au régiment par des grades obtenus, des citations et des blessures. Un rédacteur au ministère de l’instruction publique, que j’avais vu, m’avait dit que [M. Croiset4], je crois, [opinait] tout à fait de cette [façon]. Sachant tes notes d’admissibilité, je considérais ta situation comme meilleure que celle de Michel et Pierre5 (que je savais avoir échoué par suite d’erreurs sur une matière d’option et je pouvais craindre que ce fût assez lamentablement)

Eh bien ! M. Larnaude le doyen m’a reçu en me disant : « Quelles notes ont eu vos candidats ? S’ils ont eu ¼ des points, ils sont reçus d’office !! [Un député, bien au courant] sans doute, M. Bonnefous6, avait posé la question (par l’officiel7 au ministre8 il y a quelques semaines pour les étudiants en droit et le ministre (avait-il consulté M. Larnaude, je n’en sais rien) avait répondu : « Ceux qui ont eu ¼ des points seront reçu d’office ». Michel étant arrivé à Paris « en mission » sur cet entrefaite, je l’envoyai voir ses notes et celles de Pierre, et il découvrit qu’il avait eu pour ses 2 examens ratés, 2 moyennes de 9, c'est-à-dire 4 points de trop : encore un peu il aurait une mention ! Et Pierre, pour son (unique) examen raté avait eu [un 7] ce qui assurait aussi son succès. On a bu vendredi du champagne avec 2 [   ].

Par malheur tout cela n’est vrai que pour la faculté de droit, mais (à supposer que quelque député portant intérêt à l’un de vous, [même des lettres], ne décroche pas le diplôme d’office pour ceux qui ont une telle moyenne à l’admissibilité, une instruction [parue] à l’officiel du 16 janvier 19 que je t’avais que je t’envoie t’assure :
1° 4 sessions par an au lieu de 2
2° possibilité de passer la licence en 2 parties,
3° [examen] réduit à un programme restreint.
Quand ce programme aura paru, je tâcherai de le savoir et de te l’envoyer et alors si, par esprit de pénitence, vu le carême, tu t’arraches, pour quelques semaines, aux nombreuses parties de plaisir qui te réclament, tu seras peut-être vite en état d’avoir cet examen, peut-être de l’affronter en mars à ta prochaine permission. Je veux espérer qu’il y aura une [  ] pour les officiers munis de citation ! J’aurais voulu te faire [donner la maigre distinction] pour blessure à laquelle tu as droit d’après le 2° de la coupure ci-jointe,
1° parce que tu as été incorporé (sensiblement !) plus de 60 jours,
2° parce que tu dois aux fatigues du service militaire l’aggravation de la grippe qui t’a pris peu après ton arrivée au régiment, aggravation qui a amené ton entrée à l’hôpital d’Angoulême, et l’otite qui a nécessité l’opération dont tu as, je crois, l’affirmation par le docteur Luc, médecin du Val de Grâce, et la [  ] [temporaire] (voir ci-joint lettre du [  ] de [Maure] indiquant que tu aurais au Bureau de recrutement (de Saint-Omer) si tu ne les as, d’autre part, [tous] les certificats désirables.

Suite
Ne crains pas de faire valoir tes titres, ça réussit quelquefois ! Sais-tu que Guy de Place cité il y a moins d’un an, passé capitaine, vient d’être nommé chevalier de la Légion d’honneur ! Je crois qu’il a été exposé moins que vous tous. Je veux croire qu’on a pensé avec raison qu’un officier de réserve alsacien avant la guerre, devant redevenir chef d’industrie en Alsace, après la guerre, doit porter la trace des faveurs gouvernementales. C’est de la bonne politique : heureux qui est en situation d’en bénéficier.

Te rappelles-tu tes notes de novembre 1915 que j’ai notées
Latin 27/40
Psychologie 18/40
Histoire de Philosophie 10 ou 8/40
[     ] Philo de la 3e [  ] 12/20

Michel parti jeudi de [  ] pour venir ici a rejoint son unité à la frontière suisse.
Il compte voir Pierre et Antoinette9 et leur [procurer] (ainsi qu’à M. Daum10 qu’on croit savoir les accompagner) des facilités pour la circulation en Alsace : aboutiront-ils à Belfort pour aller à Mulhouse ? Viendront-ils à Mulhouse par Strasbourg : ils ne le savent peut-être pas encore eux-mêmes.

Je remets à Michel qui part demain matin un pouvoir pour rapporter de Mulhouse ce que je n’ai pu y prendre à mon dernier voyage parce que ça c’était à Strasbourg (il paraît que l’envoi par la poste avec pli chargé ne fonctionne pas là-bas).

Dans ces conditions, je ne peux que te remercier d’avoir prévu une autre manière [pour] ces précieux papiers de m’arriver, remercie ton ami si tu lui dis maintenant [   ] au sujet de cette [mission].

Sais-tu que nous avons Jacques11 depuis quelques jours : il ira sans doute cette semaine à Lille et à Douai avec Elise12. Laure Legentil13 est à Paris et est descendue chez une belle-sœur. Georges Dumas est de passage pour 24 heures. Il est aspirant et a eu une citation. L’abbé Porterat, à la veille d’être libéré est venu rapporter ici du matériel de son unité, [comme étant un de rares] [  ] non [libérés] de la dite unité.

Le colonel Bacon à qui j’ai demandé par lettre il y a 15 jours s’il ne me rendrait pas Brunehautpré pour les Degroote14 (vu qu’il [devrait] pouvoir s’installer ailleurs), ne me répond pas. Nous n’attendons pas les Degroote [  ] la fin du mois : il y aura alors beaucoup de monde dans la maison bien que nous n’ayons qu’un personnel de fortune.

Elodie a été emmenée d’urgence dans le Nord par Victor15 qui y est aux prises avec les Anglais qui le dévalisent (près de Cambrai).

J’ai cédé en principe l’éclairage de Montbard (s’il me reste quelque chose après les [   ] qui étaient déjà très importants, il y a peu [] [Mars] [  ] [pas reloué ses fermes] d’[ ]. Paul Froissart a reloué 2 des 3 fermes de Bamières ; il gardera celle de [  ] pour [d et] Laure

Il est arrivé en mairie de Campagne pour Pierre une lettre d’un [  ] d’Orville (près Doullens) demandant s’il (Pierre) vit encore et [disant] qu’il a sa montre, rapportée de Douai par sa sœur qui l’y a gardée pendant l’occupation [boche].

Je suis en difficulté avec mon propriétaire16 pour cause d’ascenseur n’ayant pas marché pendant [ ] mois. C’est très tendu.

Mille amitiés,

D. Froissart

Notes

1  Auguste Deschamps.

2  Guy de Place.

3  Ferdinand Larnaude.

4  Probablement Alfred Croiset (1845-1923), helléniste, doyen de la faculté de Lettres.

5  Michel et Pierre Froissart, frères de Louis.

6  Georges Edouard Félix Bonnefous (1867-1956), député de Seine-et-Oise de 1910 à 1936, membre de la Commission de l’armée (1917).

7  Le Journal Officiel.

8  Louis Lafferre, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-arts de novembre 1917 à novembre 1919.

9  Antoinette Daum, fiancée de Pierre Froissart.

10  M. Daum : soit Antonin Daum, père d’Antoinette, soit Michel Daum, son frère.

11  Jacques Froissart, frère de Louis.

12  Elise Vandame, épouse de Jacques Froissart.

13  Laure Froissart, veuve de Jules Froissart.

14  Henri Degroote, son épouse Lucie Froissart et leurs enfants.

15  Victor et Elodie, employés par les Froissart.

16  Possiblement M. Grunberg.


Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Léon Damas Froissart, «Mercredi 29 janvier 1919 (D)», correspondancefamiliale [En ligne], 1919, Correspondance familiale, 1910-1919,mis à jour le : 10/11/2016

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
EHESS
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F-75006 Paris