1875 |

1875-32

Marie Mertzdorff

Mardi 11 mai 1875

Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)

Mardi 11 mai 1875

Mardi 11 mai 1875

Paris le 11 Mai 1875.

Mon père chéri,

Je crois que si tu étais avec nous tu serais pleinement satisfait de ta fille au sujet de la santé. Je vais à merveille je mange, je bois et je dors comme en temps ordinaire si ce n’est que j’en ai augmenté les proportions ainsi la nuit dernière j’ai dormi douze heures. Je me lève maintenant toute la journée et hier soir même je suis descendue dîner ce qui je t’assure m’a beaucoup amusée j’ai ri tout le temps et je vois que je ne suis pas faite encore pour la vie solitaire, j’allais si bien que je ne me suis couchée qu’à 9h. Nous ne savons encore si le bon M. Pontonier1 viendra aujourd’hui car Samedi il nous a dit qu’il reviendrait bientôt pour m’ordonner une purge mais tante et oncle2 se demandant sans pouvoir répondre quelle sera l’utilité de ce remède et peut-être M. Dewulf en me voyant changera-t-il d’idées.

Je compte néanmoins sur sa visite pour lui arracher toutes sortes de permissions et surtout lui demander si je suis encore un épouvantail ou si l’on peut m’approcher comme un animal non venimeux car je t’avouerai que je me réjouis fort de revoir mes pauvres amies dont je suis privée depuis près d’un mois.

Mon bon papa il faut absolument que je te fasse part d’une grande nouvelle qui me fait bien plaisir et qui je l’espère t’en fera aussi, depuis Dimanche l’œuvre si longue et si difficile de mon démêlage est terminée sans couper un seul cheveu (cela ne veut pas dire que je n’en n’ai pas perdu) depuis ton départ les séances étaient d’une heure environ par jour.

Le temps est superbe le soleil brille et j’espère sortir bientôt c’est si agréable le beau temps.

Emilie3 est en ce moment chez Mlle Poggi4 et tante vient de partir la chercher je pense que nous allons passer toute notre journée ensemble dans le petit salon, car je pense que’Emilie ne ressortira pas car elle est un peu enrhumée, malgré sa mine de cerise.

J’ai écrit aussi à Marie Berger et je suis bien contente de l’avoir fait de suite.

Je viens d’aller chercher mes livres et je vais pour la première fois y jeter les yeux seulement je crains d’avoir un peu oublié et je suis si en retard. Emilie m’a dit que Marthe5 avait déjà 11 cachets.

Nous continuons à lire notre livre [de] Marguerites6 mais il touche à sa fin il nous amuse toujours beaucoup.

Jeannot7 va mieux et se lèvera probablement aujourd’hui pour la première fois, ce sera comme moi son 22e jour. Quant à André8 il est tout à fait remis de sa rougeole mais il vient d’avoir une petit abcès près de l’œil. Marthe9 est bien occupée dans ce moment car sa 1re communion aura lieu dans quinze jours.

Adieu mon petit père mignon si je t’écrivais aussi souvent que je pense à toi je te réponds que tu en aurais déjà bien des baisers car ma pensée est bien bien souvent à Vieux-Thann auprès de mon bon petit papa. Je t’embrasse de toutes mes forces. Ta fille qui t’aime bien tendrement.

Marie Mertzdorff

M. Dewulf vient de m’interrompre, il me trouve une mine superbe, me permet de sortir, et on ne me purgera que plus tard si je ne vais pas aussi bien sous tous les rapports que maintenant et comme je compte bien que cela n’arrivera pas c’est partie remise. Enfin voilà cette rougeole finie hourra !!!

Notes

1 Surnom donné au docteur  L.J.A. Dewulf.
2 Aglaé Desnoyers et son époux Alphonse Milne-Edwards.
3 Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
4 Mlle Poggi, professeur de piano.
5 Probablement Marthe Tourasse, compagne du cours Charrier-Boblet.
6 Charlotte Mary Yonge, La Chaîne de marguerites (plusieurs éditions françaises après la traduction de 1857).
7 Jean Dumas.

Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer ce document

Marie Mertzdorff, «Mardi 11 mai 1875», correspondancefamiliale [En ligne], Correspondance familiale, 1870-1879, 1875,mis à jour le : 05/08/2014

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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