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Vieux-Thann et Thann (Haut-Rhin)

Vieux-Thann et Thann (Haut-Rhin)

La petite ville alsacienne de Vieux-Thann (le nom prend un trait d’union depuis 1801) devient un point d’ancrage essentiel pour cette correspondance à partir de 1858 lorsque Caroline Duméril, petite-fille du savant naturaliste André Marie Constant Duméril, épouse l’industriel Charles Mertzdorff (voir la monographie sur ses entreprises et propriétés).

On trouvera ci-dessous la liste des curés de Thann et de Vieux-Thann et celle des maires de Vieux-Thann au XIXe siècle, ainsi qu’un point sur l’école de Vieux-Thann et les orphelinats de Thann.

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Histoire de Vieux-Thann    

Située sur la Thur, Vieux-Thann se développe à partir du début du XIXe siècle lorsque la qualité de l’eau de sa rivière et l’énergie mécanique qu’elle procure attirent les industriels du textile. Comme dans bien des vallées vosgiennes, cette industrie est alors en plein essor. La population passe de 462 habitants lors du recensement de 1801, à 2 318 en 1905.

En 1808, la création de la fabrique de produits chimiques par Philippe Charles Kestner, industriel originaire de Hanovre et Joseph Willien, pharmacien, puis l'implantation et le développement du textile par les frères Mertzdorff et Heilmann en 1817-1818, et enfin les établissements Berger-André qui construisent les machines à filer et à tisser et des machines à vapeur font entrer Vieux-Thann dans l'ère industrielle.

Les quartiers anciens, resserrés dans les limites de l’ancienne enceinte médiévale, se poursuivent jusqu'à Thann, formant comme un quartier du gros bourg. Les tissus urbain et industriel y croissent ensemble. Devenu chef-lieu du cercle formé par les vallées de la Thur et de la Doller, Thann a l’aspect d’une longue rue sur laquelle aboutissent des voies étroites et sombres. On y trouve de nombreux ateliers consacrés à la construction des machines pour l'impression, la teinture et le blanchiment.

Avec la création du chemin de fer dès 1839, Thann et Vieux-Thann deviennent une annexe de Mulhouse.

Au-dessus de l’agglomération s’étendent des vignobles réputés, et au-delà, la plaine de l'Ochsenfeld (qui signifie le champ aux bœufs en allemand) depuis la vallée de la Thur à l'ouest jusqu'à la Hardt (après Mulhouse) à l'Est, et du Sundgau au sud jusqu'à Ensisheim au nord.

Alors que Vieux-Thann ne subit guère de dégâts pendant la guerre de 1870, la commune se trouve en première ligne lors de la Grande Guerre : sa population doit être évacuée vers la vallée à partir du 4 janvier 1915 ; les destructions sont considérables, usines et maisons sont gravement endommagées.

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L’école de Vieux-Thann      

Lorsque Charles Mertzdorff devient maire de Vieux-Thann en 1865, il entreprend de moderniser le système scolaire de la commune, notamment pour les filles.

Jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, les enfants doivent se rendre à Thann pour être scolarisés. En 1750, est signalée à Vieux-Thann la présence de Raymond Steinmann, bourgeois et maître d’école. Il habite la maison à côté de l’église, au coin du cimetière. Son fils Joseph devient à son tour « ludi magister » (littéralement « maître des jeux », ou premier niveau de l’école). A la fin de 1790, Jean Steinmann, déclaré secrétaire-greffier, instituteur et marguillier, reçoit un traitement de 96 livres par an. En 1797, il prête serment de « haine à la royauté et à l’anarchie, et de fidélité à la République ». Mais en 1809, le bâtiment vétuste s’écroule. Comme en témoignent les rapports de l’enquête Guizot en 1833, l’enseignement primaire est effectivement implanté dans la commune mais dans des conditions précaires.

En 1863, la Feuille d’Annonces et Avis divers  de Thann et Cernay affirmait qu’au début du siècle, Vieux-Thann n’avait « ni maison d’école, partant pas d’instituteur breveté, mais un vieillard sachant à peine lire et écrire en allemand et tenant accroupis, dans une chambre basse, humide et mal éclairée de sa propre habitation, les enfants des deux sexes, non sur des bancs et à des tables, mais sur un plancher crasseux, et réunissant à ses fonctions, celles de chantre, de sacristain, de bedeau, de sonneur et de fossoyeur ». Dans un discours tenu en 1864, lors d’une remise de prix à l’école, le docteur Chrétien, président de la délégation cantonale, rappelle qu’en 1818 Vieux-Thann « était un pauvre village dont la population de 6 à 700 âmes habitait des maisons basses, petites, mal aérées, entourées la plupart d’immondices formant îlots au milieu d’eaux stagnantes et fétides, un village presque complètement dénué de ce qui prépare l’enfance à la vie intellectuelle et morale », que les « enfants étaient réunis, pendant l’hiver seulement, autour d’un maître qui leur enseignait ce que lui-même avait appris, des formules de prières, le catéchisme, la lecture, l’écriture et les notions les plus élémentaires du calcul, le tout en allemand ou plutôt dans l’idiome du pays ».

Avec le développement de l’industrie textile, la commune dispose de revenus suffisants pour acheter en 1823 une maison devant servir de cure et d’école. L’industriel et mécène Jean Heilmann prend en charge le coût des travaux nécessaires. Mais il faut attendre 1837 pour que s’ouvre une classe destinée aux filles (confiée aux sœurs de la Providence de Ribeauvillé), et 1844 pour qu’un bâtiment à vocation scolaire soit construit et ouvert aux deux sexes. L’instituteur principal est alors Michel Flach ; sœur Olympiade Chante est chargée de l’éducation des filles (1841-1851). Ensuite, prenant le titre de directrice, Emilie Halfermeyer (« sœur Emilie ») dirige l’école de filles de 1851 à 1871, assistée de sœur Marie Léon Eyband (1851-1860) puis de sœur Léonore Neff (1860-1874) ; la salle d’asile, qui reçoit des enfants de 2 à 6 ans, est confiée aux sœurs Marie Louise Grass (1861-1865), Ambrosine Kocher (1865-1866), Elia Jenner (1866-1867) et Germaine Damott (1867-1876).

Lorsque Charles Mertzdorff accède à la mairie, il fait construire de ses propres deniers une nouvelle « école de filles », qu’il inaugure le 13 décembre 1869. Elle comprend deux classes primaires et une classe maternelle (salle d’asile). Ce projet lui tient à cœur au point qu’il en étudie lui-même tous les détails (voir en particulier les lettres du 13 août et du 13-14 août 1868). Il assure la fourniture des meubles et d’un logement pour accueillir les sœurs de la Divine Providence de Ribeauvillé. Après sa mort en 1883, ses filles poursuivent son œuvre et se chargent de l’entretien de l’école, ce que font ensuite leurs héritiers qui, en 1937, la lèguent à la commune.

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Les orphelinats de Thann   

Les lettres que Charles Mertzdorff adresse à son épouse (en particulier pendant l’été 1868) se font l’écho d’une polémique suscitée par la rivalité entre les deux orphelinats de Thann.

La création de l’orphelinat Saint Joseph à Thann (dit « de Kattenbach », du nom d'un quartier de Thann) est contemporaine de la Fondation de la Congrégation des Sœurs du Très Saint Sauveur vers 1850 qui se donnent pour mission le « service au plus pauvre ». Par décret impérial du 6 novembre 1854, la Congrégation reçoit un agrément d’utilité publique pour toutes ses œuvres. L’orphelinat Saint Joseph est installé au Château de Marsilly, acheté et restauré par le curé de la paroisse Jean Baptiste Grienenberger. De 12 orphelins, au départ, l’effectif d’enfants accueillis atteint 200 en 1901. Les 280 enfants de l’orphelinat Saint Joseph du Kattenbach, tenu par les religieuses de Niederbronn, sont pour la plupart évacués en février 1915 vers Vagney dans les Vosges.

En réponse à cette initiative, les industriels protestants, avec Charles Kestner et ses gendres à leur tête, souhaitent instaurer un orphelinat municipal et laïc, annexé à l’hôpital et confié aux sœurs de Saint-Vincent-de-Paul qui s’occupent déjà du service des malades. Une souscription est lancée et un terrain acheté sur le « pré de l’hospice ». Cette double création provoque une polémique qui s’exprime dans la presse et dans l’église où le curé, du haut de la chaire, s’insurge contre les tentatives de laïcisation (lettre du 25 juillet 1868).

[source : Histoire de Thann des origines à nos jours, par Joseph Baumann, Colmar, 1981, Editions SAEP, 377 p.]

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Les maires de Vieux-Thann au XIXe siècle

1804-1808 : Joseph Kohler, cabaretier
1808-1812 : François Kohler (1776-1847)
1812-1813 : Jean Thiébaut Beck, aubergiste (1784-1854)
1813-1821 : Antoine Kuenemann, fabricant (1773-1852)
1821-1834 : Louis Misswald, fabricant (1783-1863)
1844-1848 : Sébastien Kohler, maître forgeron (1784-1860)
1848-1865: Auguste Coullerez, employé (1848-1865)
1865-1872: Charles Mertzdorff, manufacturier (1818-1883)
1872-1883 : Thiébaut Zimmermann, industriel (1814-1884)
1883-1898 : Louis Berger, industriel (1829-1898)
1898-1910 : Emile Piénoz-Kachler, industriel (1849-1914)
1910-1919 : Charles Zwingelstein, ingénieur (1871-1941)
1920-1929 : Joseph Henri Specht-Piénoz (1870-1931)

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Les curés à Vieux-Thann  
[Voir Le Clergé séculier et régulier d’Alsace de Charles Kieffer, 1927]

Antoine Gœpfert († 1804)
1804-1815 : Valentin Judlin († 1825)
1815-1816 : Jean Dietrich1816-1817 : Joseph Jaeger († 1817)
1818- 1820 : Antoine Haffner († 1820)
1821-1823 : Grégoire Hoenner1823- 1825 : Joseph Mercklen1825-1832 : Antoine Waltz
1832-1838 : Joseph Karm
1838-1862 : Pantaléon Jérôme Hirn († 1892)
1862-1875 : François Xavier Hun
1875-1881 : Louis Oesterlé († 1894)
1881-1897 : Joseph Dietrich († 1897)
1897-1906 : Jules Freund (†1906)
1907-1919 : Albert Winkler
1919 : Joseph Scholly (ou Jolly)

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Les curés de Thann

1802-1816 : Henri Weiss († 1847)
1816-1837 : Aloïse Thaler († 1838)
1837-1839 : Nicolas Doyen († 1882)
1839-1847 : Conrad Erny
1847-1874 : Jean Baptiste Grienenberger († 1874)
1875-1890 : François Xavier Hun († 1890)
1890-1904 : Georges Jost
1904-1926 : Charles Pesseux († 1926)
1927 : Emile Wurtz

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[Source principale : Vieux-Thann, son site et son histoire, sous la direction de Ivan Kaemmerlen, imprimé à Uffholtz, 1991, 226 pages]


Notice bibliographique


Pour citer ce document

, «Vieux-Thann et Thann (Haut-Rhin)», correspondancefamiliale [En ligne], Compléments historiographiques, Monographies, lieux,mis à jour le : 07/05/2019

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
EHESS
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F-75006 Paris