1857 |
1857-02
Caroline DumérilVendredi 12 juin 1857
Lettre de Caroline Duméril (Montataire) à sa cousine Adèle Duméril (Paris)
Montataire 12 Juin 1857
Tu vois que je suis fidèle à ma promesse ma chère Adèle et que je viens causer un peu avec toi ; si je ne l'ai pas fait plus tôt, c'est que j'ai été si occupée à ma tapisserie que réellement je n'avais pas un instant à moi enfin la voilà finie et expédiée depuis hier au soir et tu vois que je ne perds pas de temps puisque je n'ai pas encore déjeuné. Papa1 t'aura raconté, d'après la lettre de maman, toutes nos cérémonies de Dimanche ; je t'assure que malgré la fatigue, j'ai passé une journée dont je garderai un bien agréable souvenir. Monseigneur2 est un homme charmant plein d'esprit, de cœur, et de distinction ; pendant les cérémonies religieuses, il a été bien touchant ; et ensuite, au château, il nous a tous amusés par ses histoires et la manière si fine dont il dit les choses. Figure-toi qu'à ce dîner du château, il y avait 7 prêtres ; nous n'étions que quatre dames : Mlle de Condé3, ma cousine4, maman et moi. Les exercices religieux ont été fort longs ; après vêpres il y a eu des prières dans le cimetière ; Monseigneur chantait le de Profundis en jetant de l'eau bénite sur les tombes tandis que la population priait tout bas agenouillée sur cette terre si fraîchement remuée en tant d'endroits5.
6 h. m. 1/4.
La cloche de 10 heures et le déjeuner m'ont interrompue dans mon bavardage, ma chère enfant ; puis j'ai été au jardin, j'ai cueilli des pois, je les ai écossés, je me suis habillée et suis partie avec M. et Mme Fröhlich et maman pour faire des visites au château, chez M. le Curé et à Creil chez M. Boursier.
Nous rentrons, je viens de quitter ma livrée de cérémonie et me vois obligée de finir bien vite cette lettre si je veux qu'elle parte ce soir.
Je te charge, Dimanche, de dresser un procès-verbal très détaillé de tout ce qui se passera à la société protectrice6 car puisque j'ai le regret de ne pouvoir y assister, tu dois charitablement me dédommager le plus possible ; seulement je suis sûre qu'il faudra que tu me racontes tout cela tout bas autrement nous pourrions courir grand risque d'avoir les yeux arrachés par ton père7. Adèle et Marie8 qui savent que je t'écris me chargent de beaucoup de choses pour toi ; Marie est je crois plus animée que jamais, par moments elle nous donne de terribles envies de rire.
La campagne est vraiment chose délicieuse dans ce mois-ci, tu ne peux te figurer combien tout est vert et fleuri, la pelouse dans le jardin est magnifique, les roses, le chèvrefeuille, le sureau, tout cela est dans son beau moment, je n'ai jamais tant joui, je crois, de la nature.
Adieu, ma chère Adèle, distribue autour de toi mes sentiments de respect et d'affection et reçois pour toi-même, avec deux bons baisers l'assurance de la sincère amitié de ta cousine et amie
Caroline Duméril
Mon oncle9 n'est pas mal cette après-midi, Théophile10 part ce soir.
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D’après l’original
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