Paris¹

Mon père chéri,

Que d’excuses j’ai à te faire pour l’horrible lettre que je t’ai envoyée Jeudi elle est écrite en trois fois et il n’y a que deux pages ! il faut bien que ce soit à toi mon petit père mignon.

Jeudi nous avons eu Marie² et Paulette³ son petit frère⁴ va tout à fait bien il court dans l’appartement et le médecin lui a permis des bains. Nous nous sommes fort bien amusées puis à 4 h ½ elles sont nous les avons reconduites Emilie⁵ et Marie allaient devant ; Paule et moi les suivions et tante⁶ était la maîtresse de pension.

Hier nous avons été faire visite à M^me Charrier⁷ après notre leçon de M^lle Bosvy et qui y trouvons-nous ? Marie Des Cloizeaux. On comprend notre joie nous en avons profité pour bien causer, cette pauvre malheureuse a manqué son concours d’arithmétique parce qu’elle a cherché du trop difficile moi au contraire je crois avoir bien mis.

Je ne sais si je t’ai dit qu’elle allait être aussi de nos réunions du Jeudi.

Aujourd’hui tante va dîner avec ces messieurs chez M. et M^me Hébert cela ne réjouit pas du tout cette pauvre tante qui est obligée d’endosser sa robe de velours &&. N^ous au contraire cela nous amuse bien. N^ous irons dîner chez tante Louise⁸ afin de n’être pas toutes seules. Tout à l’heure nous irons y jouer au croquet avec Marthe⁹ (qui fait beaucoup de progrès) pendant que tante ira faire d’ennuyeuses visites. quelle excellente idée que ce jeu de croquet !!!

Tu vois, mon père chéri, comme je mets de la ponctuation dans ma lettre : c’est que, vois-tu, Mercredi prochain nous poncturons ponctuerons nous-mêmes notre dictée et il y aura un cachet spécial alors je m’exerce. Mais il n’y aura pas de concours d’écriture alors je ne m’exerce pas.

Nous avons pas mal à faire cette semaine ; principalement de l’histoire en plus de la 100 numéros de Moigno¹⁰ dont nous ferons par écrit la prochaine fois.

Bonne-maman Desnoyers11 sort d’ici elle part pour Montmorency.

Je ne sais si je t’ai dit que notre concours de piano chez M^lle Poggi était définitivement fixé à Jeudi prochain ; tu pourras donc penser à nous vers 2 h car nous ne serons pas trop à notre aise.

Le temps est superbe ; ce matin le soleil était bien drôle c’était comme une tache rouge.

Emilie me dit que je peux te dire qu’elle a été dernière en calcul et moi je te dis qu’elle a été 1^ère en <carte>.

Oncle¹² entre il me charge de te dire qu’il t’aime beaucoup.

Mon père chéri, je viens de te quitter pour aller jouer avec oncle il a mangé avec nous et nous lui avons tiré de notre tiroir toutes nos friandises plus ou moins fraîches aussi avons-nous ri à nous tordre.

Maintenant je vais m’habiller puis nous partirons.

Je t’embrasse bien bien fort ainsi que b^on-p^apa et b^onne-maman Duméril¹³

Ta petite fille qui t’aime

Marie Mertzdorff

67 Rue Cuvier

au Muséum <  > d’histoire naturelle