1871 |
1871-049
Marie Mertzdorff, Eugénie Desnoyers (épouse Mertzdorff) et Emilie MertzdorffJeudi 29 juin 1871
Lettre d’Eugénie Desnoyers (Montmorency) à son époux Charles Mertzdorff (Vieux-Thann), avec un ajout d’Emilie et Marie Mertzdorff
N° 81
29 Juin. Jeudi 1h.
Je n'ai rien de nouveau, mon cher Charles, à te marquer aujourd'hui, mais avec les irrégularités de la poste je veux t'écrire chaque jour afin d'éviter autant que possible, que tu t'inquiètes au sujet de ton trio2. Les santés sont bonnes et comme je te l'ai déjà écrit, nos fillettes sont tout à fait chez elles ici, se livrant avec la bonne-maman3 à des soins campagnards qui les amusent beaucoup, et qui les font aimer de tout le monde.
Voici le beau temps revenu ; après le succès de l'emprunt4, on veut trouver bon augure dans le soleil qui brille pour la revue au Champ de Mars ; il faut se raccrocher à tout. Pour Dimanche les élections5 ; les journalistes ont l'air d'avoir bien de la peine à s'entendre, cependant le succès des gens de l'ordre aura une grande importance pour redonner confiance dans l'opinion publique qui se jette dans toutes les excentricités.
Demain viendra la voiture de déménagement apportant les meubles de chez Mme Duméril6. J'avais pensé un peu accompagner papa7 demain matin à Paris pour voir mes tantes Target et Prévost et cousines8, je ne sais si je le ferai, en tous cas nos petites filles resteraient avec maman.
Aujourd'hui on a fait quelques petits devoirs après avoir été à la messe, puis après s'être bien fortifiées en déjeunant, on s'est mis en grands travaux de <foin> et de nettoyage, ce on veut dire Marie et Emilie. Quand on sera bien fatigué, on goûtera, et j'ai le projet de les emmener faire visite à Mme Delacre9 et faire un petit tour en même temps pour voir le pays.
J'ai écrit à Colmar10 il y a quelques jours. On se reproche une vie si calme quand toi tu as tout à faire, et que tu te fatigues pour tous. Je viens de border ma robe, raccommoder tes chaussettes, j'ai fait des tabliers aux enfants, lu le journal && tu vois que tout cela est fort prosaïque, aussi ça n'empêche pas de penser à toi. Les petits oiseaux chantent, on en découvre qui font le bonheur des enfants. Voilà Maman et les 2 fillettes qui ont terminé leur besogne et me crient bonjour par la fenêtre, elles se reposent sur le banc. Pauvre mère elle fait bien tout ce qu'elle peut pour ne pas se laisser aller aux regrets qui ne la quittent pas11.
Emilie t'embrasse bien, elle t'écrira « mais elle ne sait pas quel jour ». Marie te remercie encore de ta lettre, elle t'a écrit plusieurs fois ; c'est la 8e enveloppe qui partira à ton adresse. nous avons reçu tes lettres du Samedi et du Dimanche.
La mairie n'a pas renvoyé de Prussiens à maman, il y en a toujours dans le pays.
Adieu, mon bon chéri, je t'embrasse de tout cœur, le soir tes petites filles me disent bonsoir à ton intention, c'est une dette que je te payerai
toute à toi
Eugénie M
M. Jaeglé est-il de retour ? Comment va-t-il ?
Bon souvenir à tous.
J'ai écrit hier à Morschwiller12.
Je ne te marque pas tous les jours les amitiés de maman ça va de soi.
Mon cher papa tu dois me trouver bien paresseuse de ne pas t'avoir encore écrit. Les prussiens jouent du tambour et de la trompette. Je t'embrasse bien fort
ta petite Founichon
Je ne veux pas non plus laisser <partir> cette lettre sans venir embrasser mon bon père et lui dire que je m'amuse on ne peut mieux nous nous occupons beaucoup des lapins nous avons nettoyé leur loge de nuit d'où nous avons retiré une brouette 1/2. Adieu bon père je n'ai rien à te dire si ce n'est que je t'aime beaucoup.
Ta petite fille
Marie Mertzdorff
Notes
Notice bibliographique
D’après l’original
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