1860 |

1860-07

Léon Duméril

Mercredi 11 avril 1860 (A)

Lettre de Léon Duméril (Vieux-Thann) à ses parents Louis Daniel Constant et Félicité Duméril (Paris)

Mercredi 11 avril 1860 (A)

Vieux-Thann, Mercredi

11 – 1/4

Voici notre voyage mes chers parents. Départ Samedi à midi par un temps des plus magnifiques. Arrivée à Colmar à 3 h en nage et ne sachant que faire pour respirer un peu. Rencontre à la gare de Monsieur Zaepffel1 avec son coupé dans lequel ces dames (y compris Miki2) s’installent et ces Messieurs prennent l’omnibus. A propos de Miki elle partage son temps en wagon à faire peur à ses voisins, à prendre des pauses, à se laver les mains, à passer sur les genoux de Cécile3 et à faire Dodo. Au reste elle considère son wagon comme sa chambre et l’illusion est d’autant plus complète que grâce à l’amabilité du chef de gare nous avions un compartiment pour nous. Arrivés au faubourg de Neuf-Brisach4 nous sommes parfaitement accueillis par Madame Zaepffel. Je vais déposer ma mallette à mon hôtel où je retiens une chambre puis vais rejoindre ces Messieurs, avec lesquels je fais une promenade d’environ 1 h ½ jusqu’au pont d’Horbourg5 qui est sur la route de Brisach, laquelle route est le rendez-vous de la fashion depuis 4 h du soir.

J’oubliais de dire qu’avant de nous mettre en route on nous avait fait absorber un chocolat servi suivant toutes les règles. Nous rentrons pour absorber un souper assaisonné de Bordeaux, puis réussite aux salons < > bien jolis surtout lorsqu’ils sont garnis de beaux meubles que nous n’avions pas pu voir lors du bal, et < > je vais me coucher.

Dimanche. Temps détestable. Je visite pourtant la ville le matin jusqu’à ce qu’il ne pleuve plus, <c’est vers 10 h trois ¼>, nous nous rendons à la messe accompagnés d’une bonne pluie, ces dames bien <installées> dans le coupé (la grande calèche étant chez le carrossier) puis on revient dîner et <copieusement> après quoi on reste jusqu’au souper sans pouvoir < >

Lundi. Temps toujours assez détestable, je fais promenade pourtant jusqu’à 11 h puis vais m’habiller pour un grand dîner auquel assistent outre les habitués de ce jour M. et Madame de Rheinwald6 une de leurs <nièce> Madame Zaepffel la mère7, M. et Madame Henri Zaepffel8 venus en voitures, je raconterais bien à Maman le menu je m’en souvenais exactement encore < > (non pas que j’ai eu l’esprit troublé à partir de ce < > par les vins) enfin les dames sortent de table et ces messieurs passent comme la veille aux réussites, les panatellas9 une fois brûlés on remonte vers les 4 h et comme le temps s’est arrangé, tous les dames se rendent chez les de Rheinwald avec la voiture de ces dames ainsi que celle de M. et Madame Edgar <Zaepffel> < >. Les messieurs s’y rendent de leur côté <pour voir> toutes les espèces de poules toutes plus nouvelles et plus noires les unes que les autres, puis on reviens <occuper> cette fois les habitués seulement, et nous <repartons>.

Le mardi matin à 9 heures pour avoir été de retour hier à midi. Voici <avons ouvert> vos bonnes lettres dont on vous remercie beaucoup mais sont arrivées seulement maintenant après être <suivies> à Colmar.

Il faut espérer que la chute de bon-papa10 n’aura rien de grave

Adieu mes chers parents, recevez les meilleurs embrassements

de votre fils

Léon

Les affaires vont toujours bien aujourd’hui (ce matin) Charles11 et Monsieur Heuchel vont partir pour Mulhouse

Madame Heuchel remercie bien maman de sa lettre

Notes

1 Edgar Zaepffel, époux d’Emilie Mertzdorff, la sœur de Charles.
2 Marie Mertzdorff, âgée d’un an.
3 Cécile est la bonne de Marie.
4 Faubourg situé à l’Est de Colmar. Neuf-Brisach, à une vingtaine de kilomètres de Colmar, est une ancienne place forte construite par Vauban sur plan octogonal régulier.
5 Le pont de Horbourg a été construit sur l’Ill en 1775, sur la route de Neuf-Brisach.
6 Camille Charles Auguste de Rheinwald et son épouse Louise Zaepffel.
7 Marguerite Lefort, veuve de François Henri Mathias Zaepffel.
8 Henri Zaepffel, frère d’Edgar.
9 Le panatella est un cigare de taille moyenne (d’une longueur de 120 à 155 mm et d’un diamètre de 14 à 15,6 mm) apprécié par les hommes de la bourgeoisie. Il est cité en 1860 dans La Revue des Deux-Mondes : « Ces messieurs causaient, riaient, jouaient sur le Pont en fumant leurs cheroots et leurs panatellas. »
10 André Marie Constant Duméril.
11 Charles Mertzdorff, beau-frère de Léon Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original.


Pour citer ce document

Léon Duméril, «Mercredi 11 avril 1860 (A)», correspondancefamiliale [En ligne], 1860-1869, Correspondance familiale, 1860,mis à jour le : 04/03/2011

Danièle Poublan

Cécile Dauphin

Centre de recherches historiques
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