1875 |
1875-43
Marie MertzdorffSamedi 5 juin 1875
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 5 Juin 1875.ۍɤ
Mon bon petit Père,
Peut-être vais-je enfin arriver à t’écrire une lettre toute entière car il me semble que voilà bien longtemps que je ne l’ai fait. Jeudi je [ ] installée pensant passer un bon moment avec toi. Et force m’a été de te céder ma place à Emilie1 puisque Mlle Bosvy m’appelait. Ici nous allons tous bien et toi mon petit père que deviens-tu ? Tu sais qu’hier et ce matin nous attendions un petit mot de toi j’espère bien qu’il arrivera demain.
Jeudi en te quittant j’ai pris ma leçon, puis nous avons passé nos robes, et sommes parties avec bonne-maman Desnoyers2 où nous avons pris une voiture et nous avons conduit bonne-maman chez tante Prévost3 de là nous avons été boulevard Haussmann pour voir Lucile Denormandie et nous avons laissé notre voiture. Elle venait de sortir avec sa mère4 nous n’avions vraiment pas de chance, nous avons été alors chez Mme Grandidier5 qui a été comme toujours très aimable et très gentille. Son petit Guillaume6 est vraiment ravissant.
Nous sommes alors redescendues à pied jusqu’à la place de la Concorde où nous avons pris le bateau il y avait beaucoup de monde à cause de l’exposition7. A propos de l’exposition tu sais mon petit père que nous t’attendons pour y aller, il faut donc que tu viennes bientôt afin de nous la montrer et de nous y conduire souvent. Nous avons prêté ton petit livre à oncle Léon8 il devait a dû te le rapporter là-bas car il l’avait oublié lorsqu’il est venu ici pour la dernière fois ici.
Hier nous avons eu Mme Lima9, elle va mieux mais est toujours fatiguée car je ne sais si nous t’avons dit qu’il y a 15 jours elle était tout à fait souffrante pendant notre cours. Et cependant malgré cette indis quoiqu’elle eût l’air fort indisposée et qu’elle nous inspira beaucoup de pitié elle a provoqué chez Emilie un violent fou rire qu’elle a eu la plus grande peine à comprimer. Nous lui demandions ce qu’elle avait et elle nous a répondu O Fräulein je ne sais pas mais je crois que c’est un rhume rentré où la Gicht10 dans la tête. Tu comprends qu’Emilie qui est sujette elle à la maladie de rire ait eu de la peine à s’en empêcher.
Après notre leçon nous sommes parties avec tante11, après avoir (laissant derrière nous cette pauvre bonne-maman qui arrivait justement pour nous voir), chez Marie Des Cloizeaux qui passait comme la dernière journée à Paris. Elle a été comme toujours très gentille, elle arrivait de Beauvais où elle avait laissé sa mère12, car ils y ont beaucoup de famille et partait ce matin toujours avec son père pour Villers chez sa bonne-maman13 où sa mère ira la retrouver dans peu de temps et où ils passeront tout l’été au grandissime bonheur de Marie qui adore ce pays-là.
Nous avons été ensuite faire une petite course au bon Marché14 et enfin nous avons pris une voiture pour rentrer.
Ce matin j’ai eu MlleDuponchel15 puis nous avons déjeuné avec l’abbé David16, (au grand bonheur d’Emilie qui depuis quelque temps faisait tout ce qu’elle pouvait pour le voir), M. Oustalet et ce M. anglais qui a envoyé il y a quelque sa photographie que nous avons trouvée si laide et si ridicule il est cependant mieux que ce portrait et m’a paru assez bien quoique un peu original.
A revoir mon bon père, je t’aime de toutes mes forces tu le sais bien du reste et je t’embrasse aussi fort que je le peux. Ecris-nous bientôt je t’en prie.
Ta fille Marie
Je te fais mille excuses pour [la saleté de cette lettre] mais il fait [très] chaud. Je pense que vous avez à Vieux-Thann la même température qu’ici, nous attendons toujours l’orage car il fait très lourd, cependant la pluie ne peut pas se décider à tomber.
Notes
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer ce document
Document(s) à télécharger
Index
Compléments historiographiques
Cécile Dauphin
Centre de recherches historiques
EHESS
54 boulevard Raspail
F-75006 Paris